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vendredi 21 novembre 2014

FlashBackFriday #1 : le téléphone. fixe. Et les garçons.

Allez, c’est la mode, je m’essaie au FBF. Sauf que moi ça sera écrit, et que ça parlera de ces choses d’avant que j’aimais tant remplacées par des choses de maintenant qui me cassent les couilles.

Donc le téléphone fixe et les garçons. 

Alors je te préviens, les garçons aujourd’hui, si ça ne tenait qu’à moi, ça se passerait comme quand j’avais 12 ans à l’école : on jouerait aux billes, on ferait la course et on ferait des concours de celui qui crache le plus loin. Sauf qu’entre temps, il est arrivé deux catastrophes dans ma vie et dans le monde : la puberté et la 4G.

En 1990, j’étais en primaire. Quand je daigne sortir pendant la récré, je préfère jouer avec les garçons parce que les filles c’est chiant. Je cours, je crache, je me tache, ma couette se défait, je ris en montrant toutes mes dents sans en avoir quelque chose à foutre. 

*Et ça n’a pas vraiment changé en fait*

Après l’école, quand vraiment y’a la bande du lotissement qui se réunit, on s’appelle sur le téléphone fixe, on demande à maman et on se retrouve dans 15 minutes à la pente du stop avec nos patins à roulettes pour affronter l’autre bande et leur prouver que la pente du stop, c’est NOTRE pente.

L’été, mon ami d’enfance vient passer ses grandes vacances au soleil dans la maison juste à côté, on construit des cabanes, on saute dans la piscine, on regarde les étoiles, on grave nos prénoms dans l’arbre, on se crache dans nos mains en les serrant très fort et en se jurant fidélité à tout jamais parce qu’on a trop peur de le faire avec du sang.

*Quand j’étais petite, j’ai été lama dans une autre vie.*

En CM2, mon voisin de bureau me dit qu’on devrait être amoureux. Je lui demande à quoi ça sert, il me dit que c’est pour se faire des bisous quand on joue à traptrap bisous. Je dis ok, à condition qu’on joue à traptrap bisous sans les bisous. Il est ok. Nous voilà donc officiellement amoureux.

En 1995, au collège, je suis celle qui répond toujours « vérité » quand on joue à audace ou vérité dans les boums. On finit par ne plus m’inviter aux boums ce qui m’arrange parce que ce mois-ci, j’ai pris 2 livres en plus au club lecture, j’ai ma version de latin renforcé à finir et mon cours d’anglais renforcé à préparer.

*Oui, j’ai des lunettes aussi bien sûr ! Ha ! Et je suis dispensée de sport parce que j’ai des problèmes de croissance aux genoux, sinon, c’pas drôle ! PS : ma mère est une de mes profs. *

Mais attention, loin de moi l’envie de vous attendrir, ces années restent parmi les meilleures de toute ma life.

En 1997, je fais mon entrée au lycée, et là, les ennuis ont commencé. Je me mets à avoir des espèces de boobs. Des garçons me font part de leur envie de mettre leur langue dans ma boutche. Horreur : toutes mes copines, absolument toutes, perdent leur petite fleur. 

*L’internat ou la fête de la culotte…*

Je te rassure, j’ai fini par me mettre aussi à avoir des petits copains. Et comme c’était simple à l’époque ! On se voit, on se parle, on se rapproche, bim ! On se fait des bisous. Simple, concis, réel, immédiat. Ce qui moi me va très bien parce que, communiquer avec un humain, ça m’est quand même hyper compliqué : le seul second degré que je comprenne est le mien et personne ne comprend mon second degré à moi.

Ce qui nous amène à la disparition du téléphone fixe et à l’apparition du Short Message System.
Nous sommes en 2014. J’ai un iPhone, un iMac, un MacbookAir, un iPad. J’ai 5 flux de photos partagés, 3 adresses email, un blog, un instagram, un facebook, un linkedin, un skype, facetime, un cloud, une dropbox partagée, un googledrive (et j’ai récemment supprimé mon twitter). Je reçois toutes mes notifications sur chacun de ces appareils. Je suis au top de la communication. J’ai toujours des boobs, et en toute objectivité, je suis cent fois plus bonne qu’au lycée.

*La revanche de la petite grosse boutonneuse à lunettes qui ne savait ni se coiffer ni se maquiller MOUHAHAHAHA*

Super ! Génial ! Alignement astral, à moi les beaux gosses de Paris me direz-vous ? Non point… Aujourd’hui, avant qu’un mec ne se décide à te faire comprendre par tous les moyens les plus détournés rendus possible par cette putain de technologie qu’il veut me mettre son pénis dans ma teucha, laisse tomber la galère.

*oui, c’est bon, on est en 2014, c’est fini les roulages de pelles dans la cage d’escalier de l’internat.*

Et encore pire : avant que je comprenne grâce à tous les moyens rendus possibles par cette putain de technologie de merde que ce mec veut mettre son pénis dans ma teucha, putain sort les rames.

Parce que maintenant, à l’ère de la 4G, il y a tout un tas d’outils soi-disant là pour améliorer la communication. Je dis soi-disant parce que, pour moi, à part brouiller les pistes, je ne vois pas bien pourquoi on ne se contente pas d’un bon vieux « je prends ton visage entre mes mains et je te fais un bisou sur la boutche parce que ton sourire me fait craquer et pis c’est tout ! ».

Alors avant de continuer plus avant, je fais une aparté choses à plat :
Oui, je sais, après quelques rendez-vous, ou quelques heures, si un mec veut te voir, il te voit et c’est très clair. Je parle du mec sobre que t’as rencontré par hasard à une fête chez des amis hein, pas du relou bourré à la bière en chien à la fermeture du café Chéri. Je sais très bien que ce n’est pas forcément au mec de faire le premier pas. Je sais très bien aussi qu’un mec, ça ne parle pas. Je suis intimement convaincue du fait que quand un mec veut te pécho, il te pécho.

Moi, là, je parle en toute connaissance de cause de cas particuliers (désespérés ?) qui m’en ont fait voir de toutes les couleurs à cause de cette putain de technologie de merde.

*J’accuse !*

Le numéro que vous avez composé n’est plus attribué ou la technique de disparition "Gérard Majax".
Oui, j’ai rencontré des garçons sur internet. Oui, je connais par cœur le processus « prise de contact via le site - échanges de messages (histoire de voir si c’est encore un taré) - chat sur skype (parce que tu n’es pas connecté H24 sur l’appli adopteunmecsurtinder et que vous commencez quand même sérieusement à papoter non stop) - friend request sur facebook (pour voir un peu) - échange de numéros de portable (pour bien se synchroniser le jour J) - first date irl (ouf, c’est bien le même mec que sur ces photos, mais sans filtre) ». Notre premier rencart se passe hyper bien, s’en suit une avalanche de textos très positifs, une deuxième date très rapide, voire même une petite pelle, voire même des ébats d’une durée tout à fait honorable de 30 minutes (dernier verre, déshabillage et préliminaires compris). Et après me direz-vous ? Après ? Après plus rien. Et quand je dis rien, je veux dire rien. Même pas un « non » quand je lui demande si il est libre le weekend prochain pour aller au ciné. Non. Et le pire dans ce rien, c’est que grâce à toute ma technologie, je vois bien qu’il l’a lu mon iMessage. Je vois qu’il est chez lui à rien foutre sur le chat facebook. Je vois qu’il a « check in » au MK2 bibliothèque le soir où je lui proposais d’aller au ciné. 

*Le. Bâtard.Ô. L’enculé. De.Ses.Morts.*

Et puis après un petit silence radio, comme je me décide à laisser tomber, comme s’il le sentait, pouf ! Le revoilà tout confus prétextant une réunionite aigüe pardon, oui on se voit vite, demain promis, après le diner d’affaire à 22h je te retrouve chez toi ! Alors on se revoit, et puis le petit manège recommence.
Parce que ce qui l’intéressait lui, c’était juste le jeu. Mais ça coûte quoi de m’informer que non, tu ne veux plus me revoir ? Je ne sais pas, mais en attendant, c’est à moi de comprendre ça toute seule comme une grande et d’arrêter d’attendre ma réponse. Alors qu’avant, en 1992, il n’avait pas le choix le garçon, il était obligé de demander en vrai, j’étais obligée de répondre en vrai. Avant, en 1992, il savait très bien qu’il allait me revoir en latin renforcé et qu’on serait obligé de communiquer rapport au fait qu’on fait un exposé sur Pompéi ensemble. Donc bon, autant clarifier les choses PUTAIN !

*Le rateau irl a ceci de salvateur qu’il permet de se rendre compte qu’on n’en meurt pas. Le rateau virtuel, lui, est bien plus indigeste car pas palpable et surtout indéterminé : à quel moment on arrête d’attendre ?! Jusqu’à quand vais-je m’assoir sur ma dignité et cesser de lui trouver des excuses ?!*

Unfriend, supprimer le contact, supprimer l’historique de la conversation, masquer, bloquer, au suivant.

*Est-il vraiment plus humiliant d’être suivi que suivant ?*

Deux points tiret ouvrez la parenthèse, point-virgule tiret ouvrez la parenthèse, inférieur trois et autres té majuscule underscore té majuscule.
Avec tous les bouquins que j’ai engloutis dans ma jeunesse, je n’ai jamais parlé le langage sms. Je n’ai jamais non plus utilisé dans un contexte outrageusement erroné la ponctuation. Et j’ai mis un certain temps avant de comprendre que, quand tu regardes les petits points tiret machin de côté, ça fait des têtes ! qui veulent dire des choses ! Mais qui veulent dire quoi exactement ?! Ben… tout et n’importe quoi…

*Dans ma tête de fillette de 1992, ça ressemble à ça :
-«  Salut jAne, ça te dirait un ptit cinoche après-demain ? »  lui dit-il en lui faisant un clin d’oeil.
-«  heu non, après demain je ne suis pas libre, mais pourquoi pas le soir suivant ? » lui répondit-elle en regardant son iCal.
-«  Ça me va aussi !!! » s’exclama-t-il avec force « En plus, le lendemain c’est samedi, on pourrait même aller manger un morceau avant et aller à la dernière séance !!! » tonitrua-t-il en écarquillant les yeux en montrant toutes ses dents « je connais un bar très sympa à deux pas de chez moi pas très loin du ciné !!! » rajouta-t-il en clignant de l’autre oeil tout en tirant la langue.
-«  As-tu quelque chose dans l’oeil ? » sinquiéta-t-elle « J’ai du sérum phy si tu veux. »

Sans déconner tiret underscore tiret apostrophe*


Trois petits points et puis s’en vont…

Variante des smileys, y’a aussi les points de suspensions… qui en fait n’annoncent aucune suite mais absolument toute suite possible. Sachant que les trois petits points sont aussi personnels que de significations multiples… laisse tomber la possibilité d’interprétation de cette ponctuation dont tout le monde abuse… Et comme le mec, je ne le connais pas… et que je sais encore moins comment… je passe des heures au téléphone avec mademoiselle L. pour parler du fait que mais attends… trois petits points sur son texto là… c’est quand même ce que je crois que c’est nan… ?

*Ces PUTAINS de trois petits points…*

Si t’y vas pas, je n’y vais pas non plus.
Mon préféré. Donc moi, aujourd’hui, le vrai problème quand je rencontre un garçon qui me plait, c’est que je suis encore en mode CM2 : je me démerde pour choper son numéro, je lui téléphone pour lui proposer un verre parce que « salut, tu me plais », on boit un verre, on rit, on se plait vraiment, viens, t’es mon amoureux, on se fait des bisous, on apprend à se connaitre encore plus et on voit. Et puis en voyant, soit on se dit que c’est chouette et on continue à se faire des bisous et plus si affinité, soit on dit que c’est moins chouette et on est potes sans aucune affinité. Dans ma tête, ça se passe comme ça et c’est merveilleux même quand ça se termine. 

2014, nous les jAne on a le droit aussi de faire le premier pas, BIM ! Allons-y ! Donc là, le garçon flatté répond forcément (dans 99% des cas) par la positive, ne serait-ce que par curiosité. S’en suit un rendez-vous. Et puis… et puis quoi ? Parce que bon, je ne vais pas faire tout le boulot non plus. C’est bon, il a compris qu’il me plaisait, je lui ai dit avec des vrais mots de ma vraie voix !!! Et alors ça, c’est la dégringolade de l’émasculation, l’inversement des rôles du prince au petit pois, l’annihilation de la virilité. A partir de là, c’est la porte ouverte du pourquoi pas sans jamais dire franchement non avec force de trois petits points et de smileys. Mais surtout, c’est tout le temps moi qui propose. Avec des formes interrogatives, des virgules, des QCM. Dans le pire des cas, ça m’a conduite à ce qu’une rupture s’étale sur 10 jours, 37 sms, 4 emails, 2 appels manqués sans message vocal et 3 rendez-vous tellement monsieur avait la flemme de mettre clairement un « terme » à notre « relation » en « vrai » (mais ça, c’est une autre histoire…).

En conclusion je ne dirais que ceci : cela va faire un an qu’en même temps de ma démission de l’architecture, j’ai aussi démissionné de la relation amoureuse. J’ai décidé, après avoir rompu de manière très propre, très franche et très réelle, de faire un break de toute cette communication merdique qui ne veut plus rien dire. Pour voir un peu si ça marche encore. 
Je lutte pour arriver à dater à l’ancienne, en mode on s’appelle et on se voit, prie pour qu’un charmant garçon prenne mon visage entre ses mains et m’embrasse. Tout simplement. Avec tout ce que ça a de terriblement effrayant mais de tellement courageux. J’espère secrètement la surprise d’une visite impromptue un soir après le boulot parce qu’il « passait par ma rue ». Je tiens bon jusqu’à trouver cette perle rare qui sait ne m’envoyer que des textos normaux à caractères purement informatifs. Celui avec qui c’est tellement simple que j’arrête de communiquer sur 6 plateformes différentes pour ne rien dire, encore moins comprendre. Avec qui à la place, je construis des cabanes, je saute dans la piscine, je regarde les étoiles, je grave nos prénoms dans l’arbre. Même qu’on se crache dans nos mains en les serrant très fort en se jurant fidélité à tout jamais.


point virgule tiret fermez la parenthèse.




____over and out____



jAne.